Prise statique et erreurs diverses

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Philippe Dejean
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Prise statique et erreurs diverses

Message par Philippe Dejean »

Bonjour à tous,

Comme le disait le grand Jean Delemontez, « Tout ce qu’il n’y a pas ne coute rien, ne pèse rien et ne tombe pas en panne… »
Et il est vrai que la légèreté et la fiabilité sont des qualités primordiales en aviation. Et si en plus, ça ne coute rien, il faudrait avoir l’esprit tordu pour s’en plaindre !

Si le nouveau ULM biplace que je suis en train d’apprivoiser (ou plutôt auquel je suis en train de m’acclimater) dispose bien d’une prise de pression totale satisfaisante (a priori), la prise statique est remplacée par une simple prise de la pression dans le cockpit. Compte tenu de la phrase de Delemontez, ça ne me semblait pas forcément une mauvaise idée, sauf que…

Sauf qu’en comparant le badin et la vitesse calculée par le GPS, et bien entendu en prenant en compte le vent, j’arrive toujours à la même conclusion : le badin est optimiste d’une dizaine de pourcents.
En soit, cette erreur de vitesse indiquée n’est pas très grave :
- Pour la navigation, il suffit de retrancher ces 10% avant de prendre le vent en compte... Et une fois en vol de prendre en compte la vitesse sol donnée par le GPS.
- Pour l’approche, il suffit d’étalonner les vitesses du badin en fonction de Vs0 et Vs1 mesuré sur ce même badin, et les marges relatives 1,3 ou 1,4 restent correctes même si les chiffres sont faux.

Mais où est le problème, alors ?
Et bien le problème, c’est que si la mesure de la pression totale peut être considérée comme correcte, l’erreur vient forcément de la valeur de la pression statique…
ET QUE LA PRESSION STATIQUE EST LA BASE DE L'ALTIMETRIE !

Faisons un petit calcul :

La vitesse air (IAS vrai) est de 180 km/h (50 m/s) et le badin indique allègrement 198 km/h (55 m/s).
La différence de pression entre la pression totale et la pression cabine vue par le badin est de 18,5 hPa, alors que la pression dynamique correspondant à 180 km/h n’est que de 15,3 hPa.
Cela revient à dire que la pression cabine est inférieure à la pression statique de 3,2 hPa.
En prenant en compte la pression cabine au lieu de la pression statique à la vitesse de croisière, l’altimètre indique une altitude 90 ft plus haut que l’altitude réelle.

90 ft d’erreur, ça peut sembler faible, mais ça suffit à se retrouver dans une zone interdite, comme une zone AZBA, alors qu’on se croyait juste au dessus de son plafond. Et ce n’est pas le contrôleur qui va s’en rendre compte, puisque c’est la même pression cabine qui est utilisée pour le codage d’altitude du transpondeur. Ce n’est que secoué par la turbulence qu’on va comprendre qu’une « lampe à souder » n’est vraiment pas passée très loin en dessous !

Pour un ULM de performance correcte, mais moyenne, l’erreur d’altimétrie inférieure ou égale à 100 ft reste dans les marges qu’on se garde en temps normal… mais qu’en serait-il d’un avion plus performant ?

En refaisant le calcul pour un avion croisant à 270 km/h (IAS vraie) la même erreur de 10% donnerait une lecture badin de 297 km/h, une erreur sur la pression statique de 7,2 hPa, et une erreur d’altimétrie de 200 ft. Là, on ne rigole plus, d’autant que cette erreur d’altimétrie, calculée pour un appareil qui vole à basse altitude (densité de l’air 1,225 kg/m3), augmente avec l’altitude !

Dans le cas d’un vol en espace contrôlé, être plus bas qu’on ne le croit de plusieurs centaines de pieds, et ce également à l’insu du contrôle aérien puisque l’alticodeur subit le même biais, peut avoir des conséquences catastrophique pour l’espacement avec des avions en IFR. Le problème se pose également si on commence à se rapprocher du « minimum safe » au dessus de montagnes.

Heureusement, grâce à la tablette sous SDVFR, nous disposons de l’information de « hauteur » sol juste et fort utile pour peu qu’on ait téléchargé la carte des altitudes, et dans tous les cas, les indications altimétriques par rapport aux zones ne dépendent pas de la pression statique.

Ceci montre l’importance de prises de pression statique les plus justes possibles.
J'aurai bientôt l'occasion d'y revenir, et de proposer une solution corrective.

Bons vols,

Philippe Dejean
Les fourmis sont des guêpes comme les autres !
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Philippe Dejean
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Re: Prise statique et erreurs diverses

Message par Philippe Dejean »

Bonjour à tous,

La conclusion du message précédent est que la qualité de la mesure de pression statique est primordiale pour la justesse de la mesure de l’altitude, et par conséquent, pour la sécurité du vol.

Or si, en principe, une prise de pression statique n’est jamais qu’un orifice dont l’axe est perpendiculaire au flux d’air, le positionnement de cette prise sur l’avion est un véritable casse-tête !

En effet, la prise ne doit être placée ni dans une zone de dépression (extrados de l’aile, zone d’augmentation du maitre-couple à l’avant du fuselage, etc.) ni dans une zone de surpression (intrados de l’aile, zone de diminution du maitre-couple à l’arrière du fuselage, etc.), et ce, même en présence d’une dissymétrie du vol (glissade ou dérapage), et quelle que soit l’incidence...

Cela limite généralement la position de la prise de pression statique aux parties verticales des flancs de fuselage parallèles juste derrière l’aile, mais à une distance suffisante de cette dernière pour ne pas être faussée par les zones de surpression et de dépression engendrées par celle-ci. Pour compenser l’influence d’une dissymétrie du vol, deux prises statiques sont placées une de chaque côté du fuselage, et la pression statique envoyée aux instruments est prise au milieu du tuyau qui relie les deux prises statiques.

Une autre solution consiste à utiliser un tube de Pitot complet, doté d’une prise de pression totale et d’une prise de pression statique. Mais dans ce cas, la prise de pression totale interdit une localisation sur le fuselage à cause de l’accélération du flux d’air due à la forme du fuselage, et surtout à l’hélice. Le tube de Pitot est donc généralement placé en avant et en dessous du bord d’attaque de l’aile, mais à moins de placer une longue perche anémométrique qui déplace la sonde de Pitot bien en avant de la cellule et donc des perturbations qu'elle engendre, la mesure de la pression statique est tout de même perturbée par le bord d’attaque de l’aile qui est trop proche.

La solution efficace, précise, simple à mettre en œuvre n’est donc pas évidente à trouver.

Un petit équipement pour corriger le problème initial

C’est pourquoi je propose une approche différente : S’il est très difficile de créer une satisfaisante, pourquoi ne pas créer un artifice permettant de reconstruire la pression statique, ou du moins de créer une source de pression suffisamment proche de la pression statique pour que son usage soit satisfaisant ?

Dans le cas exposé dans le message précédent, la pression dans le cockpit est plus faible de quelques hPa à la pression statique.

Plutôt que d’essayer d’installer une prise statique à un endroit supposé correct, l’idée consiste à recréer une pression la plus proche possible de la pression statique dans un petit volume ouvert par un petit trou à l’air du cockpit, et à travers une vis-pointeau réglable, à la pression totale, comme indiqué dans le schéma ci-dessous.
Statique artificielle.png
Statique artificielle.png (17.65 Kio) Vu 198 fois
La taille de l'orifice calibré doit être suffisant grand pour alimenter efficacement les instruments qui utilisent la pression statique (Badin, Altimètre et alti-codeur du transpondeur, qui fort heureusement ont besoin d'un débit très faible), mais aussi suffisamment petit pour que le débit d'air à la pression totale nécessaire à l'élaboration de la pression statique et passant par le pointeau reste suffisamment faible pour induire de perte de charge dans le circuit de pression totale qui en fausserait la valeur.

Le volume du boitier doit également être suffisamment faible (quelques centimètres-cubes) pour ne pas induire de retard de la pression statique.

La pression résultante étant continument réglable à l’aide de pointeau de la pression cockpit, qui est trop basse, jusqu’à une pression proche de la pression totale, qui est trop élevée, il est possible de reconstituer une pression suffisamment proche de la vraie pression statique pour que les erreurs des instruments soient négligeables.

Dans le cas où la pression de cockpit serait supérieure à la pression statique, il faudrait alimenter le système avec de l'air dont la dépression augmenterait comme le carré de la vitesse air (IAS).
Pour ce faire, on pourrait utiliser un petit tube de venturi, mais il suffit de placer un tube aligné avec le vent relatif dans une zone non affectée par l'hélice comme pour la pression totale, mais en le tournant vers l'arrière.

Cette solution est petite, légère, réglable et ne nécessite l’installation d’aucune prise statique supplémentaire.
Son installation à côté de l'instrument qui utilise à la fois la pression totale et la pression statique (Badin) limite la longueur de tuyaux nécessaire à quelques dizaines de centimètres, y compris pour l'alimentation des autres instruments qui utilisent la pression statique (Altimètre et alti-codeur du transpondeur).

Qu’en pensez-vous ?

Je suis preneur de vos commentaires, et je vous en remercie par avance.

Bons vols,

Philippe Dejean
Les fourmis sont des guêpes comme les autres !
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