ça ne serait pas un Piel, mais...

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Philippe Dejean
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ça ne serait pas un Piel, mais...

Message par Philippe Dejean »

Bonjour,

Il est communément admis que voler consommera toujours plus d'énergie que rouler.
Quand sur le même voyage, on compare la consommation d'essence d'un avion léger et d'une voiture, on constate que l'avion n'est pas vraiment le plus économique.
ça semble logique puisqu'en plus de vaincre les frottements, l'avion doit aussi dépenser de l'energie pour assurer sa sustentation...

Mais ce n'est pas une fatalité !
L'avion peut être à la fois un peu plus rapide que la voiture, et au moins aussi économe en carburant :

En ces temps où le prix des carburants grimpe plus vite qu'un intercepteur, ce serait peut-être une voie à explorer, non?

N'hésitez pas à faire part de vos remarques...

Merci d'avance et Bons vols

Philippe Dejean
Les fourmis sont des guêpes comme les autres !
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Philippe Dejean
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Message par Philippe Dejean »

Bonjour,

Apparemment mon fichier ne veut pas s'ouvrir, alors voici directement le texte :

AVION DE VOYAGE ECONOMIQUE

Cahier des charges :
- Transporter quatre personnes et leurs bagages sur une distance de 1000 km sans escale dans une journée.
- Source d’énergie : moteur thermique avec réservoir de carburant (SP95, AVGAS, Jet A1 ou Gazole) rempli au sol avant le vol.
- Masse maximale au décollage : ≤ 1000 kg (CNRA)
- La vitesse de croisière n’est pas imposée a priori, mais le résultat de la minimisation de la consommation de carburant sur la distance.

Minimisation de l’énergie nécessaire pour parcourir une certaine distance :
En première approche, on ne considèrera que l’énergie supplémentaire dépensée pour la montée est récupérée pendant la descente, et que sur l’ensemble du vol les ascendances et les descendances se compensent.
L’énergie utile nécessaire correspond au produit de la distance franchissable voulue par la traction de l’hélice nécessaire pour maintenir l’avion en vol rectiligne uniforme. Pour un planeur en air calme, la finesse est définie comme la distance parcourue divisée par la hauteur perdue. C’est également le poids divisé par la traction du groupe motopropulseur pour un avion en vol horizontal stabilisé.
L’énergie utile nécessaire est donc minimale quand le rapport du poids de l’avion sur la finesse maximale est minimal. Pour un avion économique qui doit minimiser la dépense d’énergie, on a intérêt à rechercher une masse minimale et la meilleure finesse possible.

Estimation des masses :
- La masse de quatre adultes et de leurs bagages est estimée forfaitairement à 400 kg
- La masse « planeur » soit la masse à vide sans le groupe motopropulseur (GMP) et sans carburant est estimée à 40% de la masse maximale au décollage.
- On a tout intérêt à minimiser la masse maximale au décollage, mais dans un premier temps, on la fixe à la limite réglementaire 1000 kg (CNRA), ce qui laisse une masse de 200 kg pour le GMP et le carburant.
Remarque : Si en première approche, la masse du GMP est estimée à 100 kg, les 100 kg restant pour le carburant correspondent à 120 litres de gazole, 125 litres de Jet A1, 130 litres d’avgas 100 LL ou 133 litres de SP95.

Finesse maximale
Les meilleurs planeurs ont une finesse supérieure à 50. Les motoplaneurs d’école en tube ou bois et toile et à moteur VW ont une finesse de l’ordre de 30 (RF9). Avec une aérodynamique soignée et un allongement important, l’avion de voyage économique devrait égaler la finesse de ces motoplaneurs. C’est donc une finesse de 30 qui est prise en compte pour la suite du calcul.
On peut supposer que la vitesse de meilleure finesse est de l’ordre de 40 m/s (144 km/h) avec un profil laminaire et des volets en « négatif » en croisière.

Energie nécessaire pour parcourir 1000 km :
Avec une masse de 1000 kg et une finesse de 30, il faut une force propulsive de :
1000 x 9,81 / 30 = 327 N
Sur une distance franchissable de 1000 km, l’énergie nécessaire est alors :
327 (N) x 1000 (km) = 327 MJ

Energie nécessaire pour prolonger le vol pendant 45 minutes :
La marge de 45 minutes de vol de sécurité n’est pas prise en compte dans le calcul ci-dessus. Si on considère un taux de chute mini de 1 m/s, l’énergie nécessaire pour conserver une altitude constante pendant 45 minutes est de :
1000 x 9,81 x 1 x 45 x 60 = 26,5 MJ

Energie brute nécessaire :
L’énergie brute nécessaire est égale à la somme des énergies nettes divisées par le rendement propulsif du GMP.
En considérant un rendement hélice de 80% et un rendement moteur de 25% (essence) ou 30% (diesel) on obtient un rendement global du GMP de 20% (essence) ou 24% (diesel)
L’énergie brute nécessaire est donc :
(327 + 26,5) / 0,2 = 1765 MJ (essence) ou (327 + 26,5) / 0,24 = 1473 MJ (diesel)
Compte tenu des caractéristiques des différents carburants, cela représente soit :
34,3 kg de Gazole pour 1000 km soit 4,05 litre pour 100 km
34,2 kg de Jet A1 pour 1000 km soit 4,27 litre pour 100 km
40,6 kg de 100LL pour 1000 km soit 5,27 litre pour 100 km
40,1 kg de SP95 pour 1000 km soit 5,35 litre pour 100 km

On peut remarquer que :
1. Ces chiffres correspondent à une consommation de carburant qui n’est pas supérieure à celle d’une voiture sur route.
2. On considère une masse de carburant arrondie à 40 kg dans le cas d’un moteur diesel ou 50 kg dans le cas d’un moteur à essence.
- Dans le cas d’un GMP à essence estimé à 100 kg, on pourrait alléger l’avion de 50 kg ou pour augmenter la charge utile et/ou l’autonomie.
- Dans le cas d’un GMP diesel, 160 kg suffisent largement pour construire ce GMP autour moteur d’un diesel automobile.

Puissance du moteur.
Les phases du vol qui nécessitent la plus grande puissance motrice sont le décollage et la montée.
Un taux de montée initial proche de 5 m/s (1000 ft/min), permettant d’éviter facilement les obstacles en bout de piste, est indispensable à la sécurité des vols. Comme le taux de chute mini est de 1 m/s, nous considérerons un taux de montée brut de 6 m/s pour calculer la puissance utile en montée :
1000 x 9,81 x 6 = 59 kW
En tenant compte du rendement de l’hélice, ça fait un moteur dont la puissance maximale (puissance 6 ou 10 minutes) est de 74 kW (100 CV).
Avec une telle motorisation, la distance de décollage serait de l’ordre de 250 m sur une piste en dur. L’exigence CNRA de décollage d’une piste en herbe avec passage d’un obstacle de 15 m en moins de 600 m ne poserait pas de problème.
En supposant une vitesse de meilleure finesse de l’ordre de 40 m/s (en jouant sur des volets en « négatif » comme sur le Janus), la puissance du moteur en croisière ne serait plus que de :
40 x 1000 x 9,81 / (30 x 0,8) = 16,35 kW, soit 22% de la puissance de décollage.
De même, avec un taux de chute mini de 1 m/s, la puissance du moteur en circuit d’attente ne serait plus que de :
1000 x 9,81 x 1 / 0,8 = 12,3 kW, soit 17% de la puissance de décollage.
Remarques :
1. Ce chiffre de 22% est très loin de la puissance de croisière classique des avions légers (75%), justifiée par la finesse maximale très faible (environ 10) de ces avions.
2. Une charge de croisière limitée à 22% de la puissance de décollage correspond bien à l’utilisation d’un moteur de voiture sur route.
3. Les moteurs diesels automobiles sont optimisés tant en terme de fiabilité que de consommation, pour répondre à ce type de profil de charge. Leur poids n’étant plus prohibitif, surtout compte tenu de leur rendement, un moteur diesel de voiture comme le Ford 1.6 TdCi / PSA 1.6 Hdi (110 CV) ou équivalent serait donc tout indiqué pour équiper un avion de voyage économique…

L’utilisation de l’aérologie.
On peut aussi considérer que l’avion de voyage économique ainsi défini est un assez bon planeur et que, même sans spiraler dans les ascendances, l’utilisation judicieuse des reliefs et des « rues de nuages » permettrait d’augmenter la vitesse de vol et/ou d’économiser du carburant.
Dans le but d’améliorer le confort des passagers, et de réduire la fatigue de la cellule, il serait certainement utile lors des longs voyages de monter jusqu’à l’air calme, au dessus de l’inversion de subsidence (environ 3000 ft en hiver, 6000 ft en été)

Architecture de l’avion de voyage économique.
L’avion de voyage économique repose sur une cellule ayant une bonne finesse. C’est donc essentiellement un motoplaneur, et il en partage l’architecture générale.
Pour atteindre la finesse de 30, un allongement suffisant est indispensable, l’aile d’environ 24 m d’envergure, pourrait être composée de 3 parties de longueur sensiblement égales : deux « plumes » repliables au sol avec un léger angle qui permettrait de les croiser l’une devant l’autre, et une partie centrale fixe. Une fois sa voilure repliée, l’avion de voyage économique aurait une envergure comparable à celle des avions de voyage actuels et trouverait sa place dans les même hangars.
En un peu plus gros, le fuselage ressemblerait beaucoup à celui d’un motoplaneur : Le croisement entre un RF5 (tandem) et un RF9 (côte à côte) permet d’imaginer à quoi ressemblerait le fuselage d’un quadriplace. L’arrière du fuselage pourrait être légèrement pincé, mais il n’est pas évident que le meilleur compromis (finesse/masse au décollage) ne soit pas obtenu par une forme plutôt convexe comme celle du White Lightning.
On pourrait imaginer un train d’atterrissage monotrace rentrant avec des balancines rétractables, mais la traînée un train tricycle avec une lame pour le train principal et des carénages bien réalisés, resterait probablement assez faible aux vitesses de vol envisagées pour ne pas justifier la masse supplémentaire d’un train rétractable.
Le moteur thermique, qu’il soit d’origine aéronautique (Rotax 912 – 100 CV) ou automobile (PSA 1.6 Hdi), trouve naturellement sa place dans le nez…
Cet avion de voyage pourrait donc ressembler à un RF 5 élargi en quadriplace, avec un capot moteur similaire à celui du dieselis ou du gazaile II.

Altitude de vol et puissance moteur
Comme pour tout avion de voyage, il existe une altitude optimale de vol en fonction de la distance à parcourir. Bien entendu, cette valeur dépend grandement du vent.
L’optimum énergétique impose de rester à finesse maximale, c’est à dire à une vitesse indiquée constante pour une masse donnée. Cela correspond à une vitesse vraie croissante avec l’altitude. Comme la puissance est le produit de la traînée (constante) par la vitesse vraie (qui augmente avec l’altitude), la puissance moteur augmente avec l’altitude, sans que l’énergie consommée par la traînée sur la distance varie.
Pour gagner du temps, il est donc intéressant de monter assez haut, mais il faut garder en mémoire que l’avion aurait une finesse de 30 : résorber l’altitude entre le FL 95 et un circuit d’aérodrome situé à 1500 ft ne nécessiterait pas moins de 74 km de vol avec le moteur faisant mouliner l’hélice à traction nulle ! Rallonger la descente pour maintenir une traction positive permettrait certainement de réduire la consommation d’énergie sur l’ensemble du vol. Une altitude élevée ne serait donc intéressante que pour des voyages assez longs.

Le GMP
Contrairement au GMP d’un avion léger classique, la plage de vitesse de vol est réduite, mais la puissance varie d’un facteur de 4 à 5 entre le décollage et le reste du vol.
L’étude de l’hélice et de son réducteur est une part importante du projet. Il est indispensable de garder un bon rendement (au moins 80%) dans toutes les phases du vol. Ceci peut imposer une hélice à pas variable, mais aussi plusieurs rapports de réduction (boite de vitesse)

Conclusion :
Ce petit calcul montre que les techniques disponibles permettent de construire un vrai avion de voyage qui ne consomme pas plus qu’une voiture. La vitesse n’est plus un critère dimensionnant, mais la vitesse moyenne sur un trajet reste nettement supérieure à celle de la voiture.
Compte tenu de l’augmentation du prix des carburants, et du prix relativement réduit d’un moteur automobile, le coût d’un voyage (sinon celui de l’heure de vol) avec un quadriplace fin sera nettement inférieur à celui avec un quadriplace de voyage actuel.


Donc, je suis intéressé par vos remarques, critiques, etc, etc, etc

Merci d'avance

Philippe Dejean
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Gregaroulettedequeue
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Message par Gregaroulettedequeue »

Merci Philippe pour ton article toujours aussi instructif!

Je n'ai pas spécialement de remarque à faire si ce n'est à quand un projet avec ce cahier des charges? Je pense que tout ceci est parfaitement en phase avec nos problèmes d'aujourd'hui concernant le carburant, une denrée si précieuse!
On attend la suite...
Zorro
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