La force centrifuge, l'effet venturi et autres fadaises...

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Philippe Dejean
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La force centrifuge, l'effet venturi et autres fadaises...

Message par Philippe Dejean »

Bonjour à tous,

Le titre de ce post, volontairement provocateur, fait écho à celui d'un excellent livre : Nos ancêtres les Gaulois et autres fadaises de François Reynaert.

Dans ce livre, l'auteur ne met pas en doute que les gaulois aient existé, en majorité habité pour une bonne part du territoire de la France actuelle (Gaule transalpine) et que leurs gênes se soient transmis chez les français d'aujourd'hui...
En revanche, il pose une question dévastatrice pour nos certitudes de petits français : Depuis quand les gaulois sont-ils nos ancêtres ? Ou plus précisément, depuis quand les français considèrent-ils les gaulois comme leurs ancêtres ?
Et la réponse est clairement depuis la fin du 19eme siècle et la création "roman national" délibérément écrit pour nourrir les esprits des écoliers et en faire de fiers citoyens patriotes...

Bien sûr, la volonté des historiens qui ont forgé ce récit n'était pas qu'un peu plus tard, s'allongent d'interminables listes de noms sur les monuments aux morts de la première guerre mondiale.
Mais je ne peux pas m'empêcher de penser que s'ils avaient forgé un récit légèrement différent, ne remontant pas aux Gaulois, mais par exemple à Clovis (roi germanique conquérant des "états romains"), pour en faire le fondateur du royaume de France, et par succession de la France républicaine, une alliée des germains, éviter l'escalade qui a mené à première guerre mondiale :
- Plus de sabordage économique et démographique de l'Europe,
- plus de traité de Versailles et ses réparations de guerre favorisant les revanchards allemands,
- Pas de parti Nazi prenant le pouvoir en Allemagne, et une deuxième guerre mondiale bien moins meurtrière ?

Ce raisonnement qui n’engage que moi, vous semble beaucoup trop simpliste ?
Vous avez évidemment raison, et il ne faut surtout pas sous-estimer l'esprit humain pour générer ses situations chaotiques qui se terminent par des massacres et des quantités incommensurables de souffrance...

Mais je ne peux m'empêcher de penser que les phrases toutes faites que nous utilisons sans réfléchir contiennent les germes de bien des problèmes… Et en aviation, nous n’en manquons pas.

Je citerais par exemple :
- La force centrifuge,
- L'effet venturi,
- La longueur du chemin différent à l’extrados et à l’intrados d’un profil porteur,
Et toutes sortes de raccourcis pour expliquer la mécanique du vol, et qui souvent n’expliquent rien, mais embrouillent les esprits, qui ne trouvant pas d’autres explications plus satisfaisantes, les répètent encore et encore.

Dans les prochains posts, j’essaierai de tordre le cou à certaines des notions que nous finissons par croire vraies, alors que…

A Bientôt, et en attendant bons vols,

Philippe Dejean
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Philippe Dejean
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Re: La force centrifuge, l'effet venturi et autres fadaises...

Message par Philippe Dejean »

Bonjour à tous,

Je vais attaquer le premier des volets de ce post : La (prétendue) "force centrifuge"...

C’est incontestable, nous avons tous ressenti ce qu'on appelle couramment la « Force centrifuge » : cette force qui nous pousse contre la portière, ou contre la console centrale quand nous prenons un virage en voiture.
Pourtant, cette dénomination de « Force centrifuge » est imprécise, inadéquate et trompeuse.

Petit rappel de physique élémentaire :

A tout corps, on peut attacher un repère à trois axes.
Pour des raisons pratiques, nous considérerons un repère à trois axes perpendiculaires qui nous parlent à nous pilotes : (roulis, tangage, lacet).
Pour simplifier le propos, nous supposerons que le corps qui nous intéresse se réduit à un seul point de masse M.
Lorsque ce corps est soumis à des forces, la somme de ces forces, la « force résultante », agit en accélérant le corps dans sa direction et avec une accélération proportionnelle à son intensité divisée par la masse du corps accéléré.
Si la force résultante appliquée à un corps est nulle, celui-ci n’est pas accéléré, cela ne signifie pas obligatoirement qu’il est fixe, mais qu’il conserve sa vitesse sur une trajectoire rectiligne.
Le repère attaché à tout corps non accéléré, et dont les directions sont fixes est appelé « repère Galiléen ».

Dans un premier temps accrochons mentalement une ficelle non-élastique et de longueur finie à notre corps ponctuel qui dérive par rapport à nous et maintenons l’autre bout de la ficelle.
La ficelle se tend et nous devons exercer une traction pour que le bout ne nous échappe pas des mains.
Cette traction est retransmise par la ficelle au corps qui est dévié vers nous.
La ficelle ayant une longueur donnée fixe, sa trajectoire devient donc un cercle dont nous sommes le centre.
En permanence, nous devons exercer une traction sur la ficelle, c'est-à-dire une force vers le centre du cercle parcouru par le corps, autrement-dit une force « centripète », qui est appliquée par la ficelle au corps.
La somme des forces appliquée au corps est non nulle et égale à cette force centripète.
Le corps est donc accéléré vers nous, le centre, ce qui crée la courbure de la trajectoire en cercle.

Vous aurez remarqué qu’il n’y a aucune « force centrifuge » dans cette explication cohérente, et si c’est le cas, c’est tout simplement que la « force centrifuge » n’existe pas…

J'entends déjà l'objection : Oui, mais moi, je la ressens très bien la force centrifuge dans un virage en voiture !

Et bien la sensation existe, mais ce qu’on appelle la « force centrifuge » n’existe pas en tant que force appliquée.

Montons dans la voiture.
Tant que le route est droite et que notre vitesse est constante les deux seules forces qui s’appliquent sur nous sont l’effet de la gravité (notre poids) et la force de réaction du siège qui nous maintient à hauteur constante dans l’habitacle. La somme de ces deux forces étant nulle, nous continuons notre trajectoire uniforme, et c’est heureux puis que la voiture aussi.

Quand la voiture vire, le sol, via l’adhérence des pneus, tire la voiture vers le centre de la courbure du virage, comme le faisait la ficelle sur le corps ponctuel ci-dessus.
Le siège, qui fait partie de la voiture suit ce mouvement accéléré latéralement.
Si ni le siège ni la portière ni la console centrale ne transmettait la force centripète nécessaire à ce que nous suivions, nous aussi cette trajectoire courbe, nous continuerions tout droit en sortant de la voiture.
Ce que nous ressentons, en fait, c’est la bien force centripète qui nous fait suivre la trajectoire courbe.

Mais alors d’où vient la notion de « force centrifuge » ?... D’un contresens !

Dans un repère galiléen lié à un corps, celui-ci n’est pas accéléré et sa trajectoire est rectiligne et uniforme.
Toute résultante non nulle de forces appliquées accélère ce corps, et fait varier sa vitesse (en direction et/ou en module). Par voie de conséquence le repère lié au corps n’est plus galiléen.

Or, autant dans un repère galiléen, où la résultante des forces appliquée est nulle, il est logique que le diagramme des forces appliquées soit équilibré,
autant dans un repère accéléré, c'est-à-dire non-galiléen, le diagramme des forces appliquées ne peut pas être équilibré.

Or la plupart des gens ne se sentent à l’aise qu’avec un diagramme de forces équilibré, alors on invente des forces comme dans la première figure :
forces-1.PNG
forces-1.PNG (242.03 Kio) Vu 1093 fois

Même en laissant passer sur le poids qui est libellé "masse", on comprend qu'on y comprend rien.
Il y a des vecteurs forces qui s'annulent sur tous les axes, c'est à dire que la résultante est nulle alors que l'avion est sensé virer, c'est à dire être accéléré vers le centre du virage.

Si on évite d'inventer des forces qui n'existent pas on obtient :
decro1.jpg
decro1.jpg (23.26 Kio) Vu 1093 fois
Le diagramme montre le poids (vertical), la portance perpendiculaire au plan des ailes, et la résultante horizontale qui est la force centripète qui fait virer l'avion...
N'est-ce pas plus simple ?

Et bien il semble que non : Voici une figure tirée d'un logiciel de formation pour le BIA et le CAEA, c'est à dire une formation sensée expliquer la physique du vol aux élèves, et aussi former les formateurs...
forces-2.PNG
forces-2.PNG (179.01 Kio) Vu 1093 fois
Visiblement, les concepteurs ont encore une fois voulu faire un diagramme de vecteurs équilibré.
Au poids et à la portance, ils ont rajouté une force centrifuge (que nous savons tous maintenant fictive)
On se retrouve donc avec un diagramme absurde, mais les erreurs ne s'arrêtent pas là :
Avez-vous remarqué que la figure montre l'avion de face (venant vers nous) plutôt qu'en vue de l'arrière (s'éloignant) ?
Je ne trouve pas ça logique compte tenu qu'on montre un horizon artificiel incliné dans le même sens qu'on le verrait si l'avion volait dans l'autre sens...
(Et il s'agit bien d'un horizon occidental, pas un vieil horizon soviétique qui semblait fonctionner à l'envers !)

Bref, on voudrait semer l'incompréhension dans l'esprit des élèves et des futurs professeurs, on ne s'y prendrait pas autrement !... BRAVO!

Pour tant, il y a bien des gens qui ont compris le problème et ont réagi dans le bon sens... en Suisse :

https://www.google.com/url?sa=t&rct=j&q ... i=89978449

Allez répétez tous avec moi : "La force centrifuge n'existe pas !" et... Bon vols !

Philippe DEJEAN
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Philippe Dejean
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Re: La force centrifuge, l'effet venturi et autres fadaises...

Message par Philippe Dejean »

Bonjour à tous,

Si vous avez lu le message ci-dessus, vous savez que si la force centripète est bien une force appliquée au corps, la force centrifuge n'en est pas une.

Mais perspicaces comme vous l'êtes, vous avez certainement compris que je ne vous ai pas tout dit...
Et vous avez peut-être même compris que j'ai mis une incohérence sous le tapis dans mon exemple de la voiture qui roule en ligne droite...

Petit rappel partiel de ce qui est dit ci-dessus :
Dans un repère Galiléen, lorsque la résultante des forces appliquée à un corps est non-nulle, ce corps est accéléré dans la direction de la résultante.
Donc dans le repère non-galiléen lié à ce corps, il faut donc que la résultante des forces appliquée à un corps soit non-nulle pour que ce corps soit accéléré comme le repère non-galiléen qui lui est attaché.

Remontons dans la voiture qui roule en ligne droite à vitesse constante.
Quelles sont les forces qui s'appliquent à nous ?
- Dans le sens du mouvement : Aucune
- Dans le sens horizontal perpendiculaire au mouvement (autrement dit, latéralement) : Aucune
- Verticalement : Le siège et le sol de la voiture nous pousse vers le haut avec une force égale à notre masse multipliée par 9,81 N/kg...

Or nous sommes sensés avancer à vitesse constante sur une route rectiligne horizontale, ce qui ressemble étrangement à celle d'un repère galiléen qui devrait impliquer une résultante nulle !!!!
On pourrait aussi dire qu'avec une résultante verticale vers le haut, nous devrions être constamment accélérés et suivre une trajectoire parabolique vers le haut (Ce qui, fort heureusement, n'est pas le cas...)

Donc de deux choses l'une :
1/ Malgré la trajectoire rectiligne, le repère de la voiture roulant à vitesse constante n'est pas une repère galiléen à cause de la force appliquée par le siège sur nous.
2/ Avoir un repère galiléen pour repère attaché à un mobile n'implique pas une résultante nulle.

Eh bien, c'est la première proposition qui est juste, et par conséquent, la deuxième qui est fausse !

Le repère lié à la voiture qui roule en ligne droite n'est pas un repère galiléen.
Il se déplace en ligne géométriquement droite dans un espace courbé par la gravité de la terre.

A l'inverse, c'est bien un repère galiléen qui est lié à une station spatiale en orbite autour de la terre.
Dans l'espace courbé par la masse de la terre, la trajectoire elliptique de la station est bien une droite (qui peut certes être rebouclée sur elle-même, c'est une des propriétés peu évidentes des espaces courbes)
La résultante des forces appliquée est nulle (et c'est pourquoi on parle alors d'apesanteur, ou plus précisément de micro-gravité).

Vous remarquerez que cette explication met implicitement mais définitivement fin au vieux débat sur la différence de nature entre :
- La "masse-inerte" qui est le rapport entre la force appliquée et l'accélération qui en découle,
- La "masse-grave" qui est affectée par la pesanteur et qui se traduit par le poids.

Dans un espace courbé par une grosse masse (notre planète en l'occurrence), les deux définitions sont identiques (à la masse-inerte).

Donc, pour voler en ligne droite dans notre bonne atmosphère qui reste à sa place grâce à la gravité et la courbure de l'espace qui en est la conséquence, il faut générer de la portance.
On peut utiliser la poussée d’Archimède avec un ballon ou un dirigeable.
Nous préférons généralement la créer dynamiquement grâce à d'une voilure...
Ceci fera le lien avec le prochain message...

Bons Vols

Philippe Dejean
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Re: La force centrifuge, l'effet venturi et autres fadaises...

Message par Philippe Dejean »

La portance.

Nous avons vu dans le message précédent que pour voler en ligne droite, il est indispensable de créer une force opposée au poids.
Cette force, la portance, peut être créée par la poussée d’Archimède comme pour les ballons et les dirigeables, mais pour les plus lourds que l’air, cette création de portance est dynamique, c'est-à-dire qu’elle consomme de l’énergie.
Créer dynamiquement une force en absence d’un support solide, consiste à accélérer une masse.
En effet, comme appliquer une force sur un corps l’accélère dans la direction de cette force, le point d’application de cette force reçoit une réaction égale et opposée.
Un avion, ou un hélicoptère, dispose autour de lui d’une certaine quantité d’air qu’il peut influencer par ses ailes, ou par son rotor.
En accélérant cet air vers le bas, il reçoit par réaction, une force vers le haut : la portance.

Considérons le cas de l’avion en vol horizontal.
Les caractéristiques géométriques détaillées de l’aile de l’avion ne nous intéressent pas.
Nous la considérerons, comme une boite noire, avec des conditions à l’entrée et conséquences à la sortie.

Face à l’avion, arrive un flux d’air grâce au vent relatif, Vr dont la vitesse n’est, au signe près, que la vitesse V de déplacement de l’avion dans la masse d’air.

Supposons que la part de ce flux qu’il peut influencer est une section circulaire dont l’envergure E de ses ailes est le diamètre.

Par unité de temps, le flux massique d’air influencé est égal à la densité de l’air, multiplié par la vitesse de vol, et multiplié par la section du cercle dont l’envergure est le diamètre.

Pour obtenir une portance égale au poids, qui est constant, il faut donc accélérer ce flux massique vers le bas en lui communiquant une vitesse verticale inversement proportionnelle au flux massique, c'est-à-dire inversement proportionnelle à la vitesse de vol, pour une densité d’air donnée.

Plus simplement :
- Plus l’avion vole vite, moins il doit accélérer la veine d’air qu’il influence vers le bas.
- A l’inverse, plus il vole lentement, plus il doit accélérer la veine d’air qu’il influence vers le bas.

Les ailes agissant comme un déflecteur de l’air incident, on comprend aisément que même avec une aile idéale, la composante verticale de la vitesse de l’air après l’aile ne peut pas dépasser la vitesse horizontale de l’air incident. (En réalité, la composante verticale de la vitesse de l’air défléchi, n’est qu’une petite partie de la vitesse de l’air incident).

Une conséquence inévitable de ce phénomène, est qu’il existe une vitesse de vol minimale en dessous de laquelle l’avion ne reçoit pas face à lui un débit massique suffisant pour qu’il puisse générer une portance suffisante pour équilibrer son poids.
Cela revient à dire que sans rien supposer du fonctionnement propre de l’aile, on explique l’existence d’une vitesse de vol minimale, en dessous de laquelle l’avion ne peut que descendre. Que cette descente soit « parachutale » ou un décrochage ne change rien au raisonnement.
Certains se demanderont, dans ces conditions, comment un hélicoptère peut-il faire du vol stationnaire : La réponse tient à la « voilure tournante » si on se place non pas dans le repère de l’appareil, mais dans celui d’une de ses pales, on voit que la vitesse de vol de ce profil porteur reste élevée… Et que si le rotor ralentit trop, on se retrouve dans la situation du paragraphe précédent.

Considérons maintenant notre « aile-déflecteur » comme un objet géométriquement constant et faisons varier la vitesse.
Si, par exemple, on double la vitesse de vol :
- Le débit massique de l’air influencé double
- La composante verticale de la vitesse de l’air en arrière de l’aile double aussi.
Le doublement de l’accélération d’un débit massique également doublé induit un quadruplement de la force. Autrement dit, toutes choses égales par ailleurs, la portance varie comme le carré de la vitesse de vol.
Là encore, on peut démontrer une loi générale de l’aérodynamique « avec les mains » sans faire la moindre supposition sur les paramètres propres de l’aile.

Intéressons-nous maintenant à ces fameux paramètres propres de l’aile, et en particulier au profil de l’aile.
Intuitivement, pour obtenir une déflection, on imagine assez facilement une surface courbée de telle manière à être alignée sur le vent incident à l’avant et alignée sur la vitesse de l’air défléchi à l’arrière.
Profil mince.png
Profil mince.png (6.31 Kio) Vu 1044 fois
Même avec un déflecteur parfait, sans frottement, l'amplitude de la vitesse de l'air défléchi ne peux pas être supérieure à la vitesse du vent relatif.
Comme cette vitesse se décompose en une partie verticale Vz et une partie horizontale Vx, cette dernière est inférieure au vent relatif.
Cela signifie que selon l'axe horizontal, la vitesse de l'air à diminué. Cette décélération, Vt, implique une force appliquée sur le déflecteur : la Trainée induite par la portance.

Les ailes des premiers avions étaient construites sur cette idée, et force est de constater que ces avions volaient assez bien compte tenu de la faible puissance massique des moteurs de cette époque.
Breguet14A2.jpg
Breguet14A2.jpg (59.89 Kio) Vu 1044 fois
Pourtant ce type de profil ne manque pas de défauts :
- La très faible épaisseur du profil ne permet pas d’y loger une structure raisonnablement légère. Une structure légère, elle est forcément externe, par exemple sous forme de la structure de boite haubanée des biplans. Les monoplans étaient, eux aussi, largement haubanés.
- Le bord d’attaque très mince ne fonctionne que pour des incidences très proches de celle ou l’avant du profil est aligné avec le vent incident. Si on s’écarte trop de cette incidence, les filets d’air décrochent soit à l’intrados, soit à l’extrados.
Ces deux caractéristiques se combinaient pour aboutir à des avions dont la plage de vitesse de vol était très réduite. Avec les premiers moteurs qui permettaient juste de ce maintenir en l’air, ce n’était pas vraiment un problème, mais dès que les moteurs ont gagné en puissance et en légèreté, il a fallu faire évoluer ce profil.
- Pour loger une structure interne, il faut, notamment pouvoir loger un longeron d’une hauteur suffisante à une distance proche du point d’application de la portance. Dans l’image ci-dessous, la hauteur du longeron est de 15% de la corde, et il est placé à 30% de la corde.
- Pour éviter que les filets d’air ne décrochent dès le bord d’attaque, celui-ci a un rayon d’environ 3% de la corde.
NACA_4415.png
NACA_4415.png (24.22 Kio) Vu 1044 fois
Le profil qui est dessiné sur cette base est nettement plus épais, mais conserve les caractéristiques de portance liée à la courbure à l’angle d’incidence correspondant à l’alignement du profil mince sur le vent relatif. Pour toutes les autres incidences, il est porte (ou déporte) plus que le profil mince car le décrochage des filets d’air à l’intrados ou à l’extrados n’apparait que pour des angles d’incidence beaucoup plus importants. Sauf pour les profils à très forte courbure, le coefficient de portance maximal est supérieur.

Maintenant que nous disposons d'un profil qui fonctionne bien sur une large plage d'incidence, a-t-on besoin d'une courbure aussi importante que dans le cas du profil mince ?

La réponse à cette question dépend essentiellement de la plage de vitesse voulue pour l'avion, qui est également lié à la puissance du moteur ramenée à la masse maximale de l'avion.

Pour tous les appareils faiblement motorisés, ou ceux qui doivent décoller et atterrir à basse vitesse, un profil fortement courbé et relativement épais est préférable, car il permet des gains de masse structurale et une trainée réduite par l'adaptation du profil à la vitesse de vol lente.

Par contre, si c'est la vitesse de croisière élevée qui est recherchée, un profil à faible courbure, et relativement mince, est à privilégier.
Pour les phases de décollage, d'approche et d'atterrissage, des dispositifs hypersustentateurs permettent de créer temporairement un profil à courbure supérieure, au prix d'une trainée supérieure qui permet des angles de descente intéressant, mais impose une motorisation suffisante pour assurer un taux de montée correct.

Toute cette présentation de la portance, et sa conséquence inévitable, la trainée, repose sur l'accélération de l'air fourni par le vent relatif.
La relation entre la portance et la vitesse de vol à incidence constante, la justification d'une vitesse minimale s'expliquent sans introduire des considération de pressions ni d'accélérations locales du flux d'air.

Je rentrerai plus dans les détails dans un prochain message.

Bons vols

Philippe Dejean
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